Ceci est un témoignage rendu ensouvenir des dernières semaines de la vie de mon grand-père.

Son « sort s’est joué »sur un enchaînement de mauvais concours de circonstances :

En refusant une invitation à dîner le 18 juin 1944, En ne faisant pas parti des 300 détenus libérés de la prison de la Mal Coifféeentre les 20 et 23 août,

En prenant le dernier train qui évacuera les 64 derniers internés de la MalCoiffée dans la nuit du 24 au 25 août à destination de Buchenwald, où ilarrivera le 10 septembre,

En décédant le 4 mars 1945, 38 jours avant la libération du camp de concentration deBuchenwald.

La déportation du 24 août au 10 septembre 1944


Aujourd’hui je peux donner l’itinéraire du sinistre convoi qui nous transporta à Buchenwald.

Le voyage fut long et dur, chaque détenu avait reçu comme nourriture un pain de 3 livres et quelques biscuits de guerre moisis, au départ de Moulins. A Paray le Monial nous sommes restés trois jours immobilisés en pleine gare, toutes les voies étaient coupées. Si les sabotages pour nous étaient cause de joie, attaques du maquis et attaques aériennes ne nous furent pas épargnées au cours de ce voyage vers l’Allemagne ; voyage qui fut un véritable calvaire.

Nous étions 55 par wagons sans compter les deux geôliers boches, il nous était impossible de nous allonger la nuit, ni même de bouger, à peine avions nous la place de nous accroupir, un récipient hygiénique pour tous et une fois plein, le contenu débordait sur nous et s’étalait sur le plancher du wagon. C’est grâce à la Croix Rouge de Besançon et à la population que nous reçûmes quelques vivres qui nous apportèrent un peu de réconfort. La plus grande partie du ravitaillement allait à nos gardiens. Nous ne risquions pas de nous échapper ; notre convoi comprenait une vingtaine de gardiens de la « Mal Coiffée », une dizaine de SS armés de fusils mitrailleurs, quelques Allemands et quelques miliciens qui comme Laval, souhaitaient la victoire de l’Allemagne.

Pendant les arrêts de longue durée, toute la garde était en alerte, ceinturant le train d’un réseau d’armes automatiques ; la nuit venue, l’on cadenassait nos wagons. Vous ne pouvez imaginer par quelles angoisses nous sommes passés, surtout lorsque le train était attaqué par des avions. Nous étions enfermés et pendant les alertes, nos geôliers se tenaient à bonne distance (200 mètres environ), pour garder le train, au cas, très improbable, où nous eussions pu nous échapper, en cas de bombardement ou d’incendie du convoi.

Le premier septembre, nous sommes arrivés à Belfort, la gare était comblée de militaires et civils allemands et français (soi-disant), car c’étaient des miliciens attendant les trains pour les conduire au pays de leurs chefs : HITLER et HIMMLER. Les voies ferrées étaient coupées, les dépôts de la gare bombardés, plus de machines pour aller plus loin, nous sommes descendus des wagons, frappés à coups de crosse de fusils, l’on nous a dirigé dans une caserne où nous avons rejoint des centaines de détenus des précédents convois. Nous sommes repartis le 5 septembre, toujours dans les mêmes conditions de voyage, dans un convoi de 1700 détenus, convoi n°459, en direction de l’Allemagne nazie. »

            De ce convoi, seuls 170 français et 6 étrangers sont entrés à Buchenwald, les autres devaient être des jeunes raflés pour le STO. L. PEROZ et G. JABEAUDON donnent le même chiffre.

 

            « Voici le respect à la parole donnée, voici les promesses respectées de nos geôliers au départ de Moulins ; mais nos gardiens avaient fait promesse à leur chef de nous livrer aux bourreaux du camp de Buchenwald, le 10 septembre. »

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